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Protection de l’enfance : l’optimisme et l’humour comme outils ?

Les éducateurs spécialisés travaillant dans le secteur de la protection de l’enfance sont quotidiennement confrontés à la vulnérabilité des jeunes qu’ils prennent en charge. Les parcours de ces enfants et adolescents sont complexes, c’est pourquoi il est parfois difficile pour le travailleur social de gérer certaines situations.

Des techniques existent pour aider à la construction de la relation entre le professionnel et ces jeunes au vécu douloureux. L’optimisme et l’humour font partie des outils de travail que les travailleurs sociaux n’osent pas toujours suffisamment utiliser, même s’ils comportent de nombreux atouts face à un public en souffrance. Encore faut-il qu’ils soient employés à bon escient, et que les intervenants se sentent à l’aise. C’est pourquoi la formation des professionnels du secteur social et médico-social reste encore une fois primordiale.

L’optimisme et l’humour sont des outils relationnels pour l’éducateur spécialisé

L’humour et l’optimisme permettent d’atteindre plusieurs objectifs :

Ils facilitent la relation entre le travailleur social et le jeune

En effet, tous les métiers du social sont centrés sur la relation. Le travailleur social ne peut pas atteindre les objectifs définis avec le jeune qu’il accompagne s’il n’instaure pas cette relation. L’éducateur spécialisé doit donc en premier lieu aller à la rencontre de l’autre et faire naître la confiance pour pouvoir mener à bien sa mission. 

Ils suppriment les blocages qui nuisent au tissage des liens

Suivant la manière dont la relation se construit entre le travailleur social et l’enfant ou l’adolescent pris en charge, l’accompagnement sera plus ou moins efficient. Cette relation est bien souvent complexe à mettre en place, car l’éducateur rencontre des obstacles (il peut avoir du mal à comprendre et à rejoindre la vision du monde de l’autre, le jeune peut être agressif, etc.). Ces freins nuisent à l’instauration d’une bonne communication. De plus, l’intervenant ne peut pas changer la personne qu’il a en face de lui, il doit composer avec et s’y confronter. Les professionnels finissent parfois par baisser les bras face au comportement de certains usagers, car aucune des tentatives de mise en relation ne fonctionne.

L’optimisme (encore faut-il y croire, c’est-à-dire en soi et en l’autre) et l’humour permettent d’alléger la relation, d’éviter la morale et le sentiment de jugement. 

Ces attitudes permettent ainsi de libérer les émotions et les tensions entre l’éducateur spécialisé et les jeunes.

Ils réduisent le conformisme propre aux institutions

L’accueil dans l’institution est soumis à des tensions, des codes, des protocoles, qui laissent peu de place à la fantaisie. C’est pourquoi les professionnels n’osent pas faire preuve de légèreté. Ils ont peur que celle-ci soit mal comprise, irrespectueuse. Ils ont l’impression que cela est malsain.

Les jeunes peuvent être sur la défensive au premier abord, et les professionnels se retrouvent parfois démunis. L’humour et l’optimisme sont alors de bons outils. Mais pour faire de l’humour, il faut d’abord se connaître. Le travailleur social dédramatise, apporte de la légèreté, et ensuite il est possible de faire appel à l’humour. L’humour donne l’occasion de relativiser la souffrance, de se décentrer, de faire appel à d’autres ressources chez soi. C’est un détour qui permet de dire les choses d’une autre manière.

Grâce à l’humour, le professionnel va interpeller l’enfant ou l’adolescent. Avec cet outil, il est possible de mieux faire passer le message à l’autre, car ce dernier sera plus réceptif, se braquera moins. Le jeune comprend que l’éducateur a envie de partager quelque chose avec lui. Il aura plus envie d’écouter, et il aura surtout le désir de répondre de la même manière. Une fois que l’humour a permis de détendre l’atmosphère, il est plus facile de discuter des problèmes du jeune, ce dernier est plus enclin à se confier et à collaborer avec les équipes. 

Ils permettent de jouer sur l’inattendu

Le rire peut être déclenché et utilisé :

  • si une mésentente se crée entre le professionnel et l’enfant ou l’ado ;
  • si le jeune commet des écarts qui l’empêchent de s’adapter à l’institution (par exemple, il se lève la nuit pour aller dans les chambres des autres enfants) ;
  • en apportant un élément inattendu, absurde, pour déclencher l’humour.

C’est cette dernière technique qui semble particulièrement bien fonctionner. Le jeune est surpris de la situation, ce qui modifie son attitude.

Jouer sur l’inattendu permet de lever la gravité du discours souvent présent dans les institutions, et de provoquer des échanges différents entre le professionnel et la personne accompagnée. Cela offre à chacun la possibilité de prendre de la distance face à une situation difficile, et d’instaurer un petit rien au moment présent, de retrouver de la légèreté. 

Même si le professionnel ne se transforme pas en clown, il est possible de prendre son exemple pour jouer sur l’inattendu, pour inviter les mineurs ou jeunes majeurs à se confier puisque par le biais de l’humour, la parole sera plus spontanée, moins moralisatrice.

Bien souvent, le jeune sait pourquoi le professionnel vient le voir. Par exemple, l’éducateur spécialisé se rend dans sa chambre tous les soirs à la même heure pour lui dire de se coucher. L’adolescent, qui n’a pas envie de dormir, va à chaque fois exprimer le même refus et mettre le professionnel en situation d’échec car ce sera tous les soirs le même conflit. Si l’éducateur crée une situation de surprise, qui déconcerte le jeune (en lui racontant des histoires absurdes, par exemple), à travers le rire et la détente, il est mis en confiance, se sent important et compris. Cela permet alors d’envisager la construction d’une nouvelle relation non plus basée sur la confrontation, mais sur la compréhension et la prise en compte détournée de la difficulté à aborder la nuit.

Ils lèvent les sujets tabous

Certains professionnels n’osent pas échanger sur des sujets comme la sexualité, par exemple. En recourant à l’humour, il est plus facile d’aborder des thèmes de ce type, de détendre l’atmosphère.

La pratique de l’humour connaît des limites

Certains professionnels ne sont pas à l’aise, et sont réticents à utiliser le rire dans leurs pratiques. Ils sont quotidiennement confrontés à des situations de souffrance, c’est pourquoi ils peuvent avoir du mal à utiliser cet outil, qui est synonyme de légèreté.

Il y a des limites à l’humour, il n’est pas possible de rire de tout. La pratique de l’humour doit se faire dans le respect de l’autre, la bienveillance, l’objectif n’étant surtout pas de ridiculiser l’enfant ou l’ado. C’est pourquoi cet outil doit être utilisé avec précaution, car il ne peut pas répondre à toutes les situations.

Des compétences doivent être acquises pour recourir à l’optimisme et l’humour en institution 

Celles-ci sont au nombre de trois :

La prise en compte de soi 

Le professionnel doit construire la relation selon ce qu’il éprouve. Il faut également avoir une bonne connaissance de soi.

La décentration

L’éducateur a besoin de prendre du recul par rapport au but qui est visé avec le jeune. Il faut parfois mettre l’objectif un peu de côté pour construire une relation meilleure. C’est souvent quand la poursuite de l’objectif est primordiale que la relation échoue.

L’abandon de l’argumentation 

L’éducateur spécialisé ne doit pas vouloir convaincre à tout prix dans telle ou telle situation , car le discours n’est pas entendu : « Tu dois te coucher à 9 heures, parce que les enfants de ton âge doivent se coucher à cette heure-ci. » En pratiquant l’optimisme et l’humour, le jeune va se questionner sur la situation, car il n’a plus le discours directif habituel. Il a l’impression qu’on lui laisse le choix, plus de libertés, et il a ensuite plus envie de changer les choses.

La formation professionnelle est le meilleur moyen de pratiquer l’humour et l’optimisme en institution

Les professionnels du secteur social et médico-social tentent d’introduire l’humour dans leurs pratiques. Malgré tout, ils peuvent rencontrer des réticences de la part de personnes pour qui l’humour n’a pas sa place dans le travail. De plus, la pratique de l’humour devant se faire dans le respect de chacun, il n’est pas facile de savoir comment s’y prendre.

Chez Epsilon Melia, nous sommes conscients des difficultés que peuvent rencontrer les travailleurs sociaux qui souhaitent utiliser ces outils pour améliorer leurs relations avec les jeunes qu’ils accompagnent. C’est pourquoi nous avons créé une formation sur l’optimisme et l’humour dans la relation éducative afin de leur apprendre à utiliser cette méthode à bon escient. Notre programme se déroule sur deux jours en intra.

Epsilon Melia est un organisme de formation continue qui accompagne les professionnels du social et médico-social depuis plus de 15 ans. Nous pouvons nous déplacer sur toute la France ainsi que dans certains pays francophones comme la Suisse, la Belgique, la Guyane, etc. N’hésitez pas à nous contacter si vous avez besoin de renseignements complémentaires.

 

Nous remercions Béatrice Lacaze, animatrice de GAP, pour l’aide qu’elle nous a apportée pour la rédaction de cet article..