Un métier humain, pour le pire et le meilleur !
L’humain avant tout !
La « première vie » de Nathalie ? Une carrière dans la grande distribution où elle occupe de nombreux postes, dont ceux d’hôtesses de caisse et service clients. Après 29 ans au sein de la même entreprise, Nathalie est épuisée par ce secteur d’activité : « J’évoluais dans un environnement peu humain, obsédé par la rentabilité. J’ai voulu retrouver un métier plus proche de mes valeurs ».
Retrouver, oui, car Nathalie avait déjà exercé le métier d’intervenante à domicile : « Après avoir quitté l’école à 18 ans, je voulais me rendre utile. À l’époque, je vivais dans le Nord, et j’ai répondu à des petites annonces pour travailler chez des personnes âgées en milieu rural ». Ce métier lui plaît beaucoup mais ne lui fournit que 20 heures de travail par semaine. Nathalie choisit donc un poste à temps plein dans le commerce – « mais deux personnes avec lesquelles j’avais des liens privilégiés m’ont sollicitée. En plus de ma journée en magasin, je me suis occupée d’elles jusqu’à leur décès. J’en garde un souvenir très fort ! », nous confie-t-elle avec enthousiasme.
Le relationnel et ses difficultés
Aujourd’hui, Nathalie est heureuse d’avoir renoué avec l’intervention à domicile. Mais exercer un métier « de l’humain » implique aussi de se confronter aux difficultés de la relation !
D’une part, certaines personnes accompagnées peuvent être vraiment désagréables. « L’une des dames chez qui j’interviens me critique constamment, et me reproche de devoir me payer ! », raconte Nathalie. Elle essaie de prendre du recul vis-à-vis de ce comportement : « Je ne le prends pas personnellement, car je sais que cette femme se plaint souvent et de beaucoup de monde. D’ailleurs, elle serait bien seule si je ne venais pas la voir… ». Pour cette raison, Nathalie ne s’imagine pas arrêter de travailler chez elle. En revanche, elle lui propose un petit volume horaire pour pouvoir se consacrer à des personnes plus enthousiastes.
D’autre part, l’intervenant·e à domicile travaille chez des gens âgés ou malades ; iel est donc souvent confronté·e à la dégradation physique et à la mort. À ce sujet, Nathalie est très honnête : « Bien sûr que la maladie m’impressionne et que la détresse de l’autre me touche énormément ». Mais elles ne lui font pas peur, au contraire : Nathalie veut aider, elle veut agir. « J’écoute les malades avec intérêt, je suis curieuse de leur parcours et de leur vécu différent du mien ». Lors d’un décès, l’intervenant·e à domicile peut être une personne ressource pour les familles qui le souhaitent. « Après la mort de M. Jean*, je me suis occupée de l’organisation de l’enterrement et des démarches administratives, à la demande de son petit-fils », explique Nathalie. Ces disparitions n’en restent pas moins douloureuses pour elle aussi : « Les relations que j’entretenais avec les personnes décédées me manquent. Je pense à eux souvent ». Nathalie dit puiser de la joie dans les souvenirs heureux des moments partagés ensemble.
À travailleur indépendant, quotidien valorisant
Lors de sa reconversion en 2013, Nathalie se rapproche d’une association de services à la personne. Elle est vite déçue : on ne lui propose que 20 à 25 heures d’intervention par semaine, réparties du lundi au dimanche de manière irrégulière. « Je me souviens d’une journée où on m’a appelée trois fois pour changer mes horaires ! » Nathalie ne se reconnaît pas dans les méthodes de management : l’association impose à ses salariées d’indiquer sur une tablette leurs heures d’arrivée et de départ afin d’optimiser leur temps. De plus, un·e même bénéficiaire est rarement suivi·e par les mêmes intervenantes, même s’iel en fait la demande. « Je ne pouvais pas m’impliquer comme je le souhaitais dans la relation d’aide », résume Nathalie.
Elle décide donc de se mettre à son compte et s’inscrit dans le réseau du Cesu (Chèque emploi service universel) : « Tout se passe sur le site de l’URSSAF. La personne aidée y déclare mon travail, l’URSSAF prélève son compte et me paie, avec prélèvement à la source. Les bénéficiaires sont remboursés à 50% minimum et, depuis peu, n’ont même plus à avancer la différence ». Nathalie appréhendait de devoir trouver du travail par elle-même, mais elle n’a jamais été en difficulté à ce jour. « Le bouche à oreille est très efficace », constate-t-elle.
Nathalie est libre d’organiser son planning et de s’impliquer autant qu’elle le souhaite. Elle a su créer les conditions nécessaires pour bien faire son métier et, en conséquence, les familles qu’elle accompagne lui témoignent leur reconnaissance. « Mon travail est très valorisant », nous répète-t-elle. Dans l’immense majorité des cas, les personnes aidées la remercient tous les jours. « La confiance se construit sur la durée, explique Nathalie, et les membres de la famille sont sensibles au fait que leur proche accorde sa confiance à quelqu’un ». Ainsi, le fils d’une dame accompagnée lui disait récemment : « C’est grâce à vous que Maman a pu passer deux ans supplémentaires à la maison ». Cette gratitude et ces retours chaleureux portent Nathalie au quotidien.
Auxiliaire de vie sociale, Assistant·e de Vie, Aide à domicile, Aide-ménagère, professionnel·les du soin infirmier, médecins généralistes ou spécialistes… Les différent·e·s intervenant·e·s à domicile donnent beaucoup d’elleux-mêmes, aussi bien physiquement qu’émotionnellement. Comme le montre le témoignage de Nathalie, ce métier exigeant prend tout son sens dans la relation.
* Les noms des personnes accompagnées ont été changés.