Pourquoi la médiation est-elle un outil précieux dans le milieu professionnel ?
Dans le monde du travail, les conflits sont inévitables. Qu’il s’agisse de désaccords sur les méthodes de travail, de tensions interpersonnelles ou de situations plus graves comme des allégations de harcèlement, les conflits peuvent avoir des répercussions majeures. Ces derniers affectent à la fois la santé mentale des salarié·es, la cohésion des équipes et les performances globales de l’organisation. Dans un climat relationnel dégradé où la communication est rompue, la médiation permet d’accompagner la reconstruction d’un climat de confiance et d’un travail apaisé. En facilitant l’expression des émotions et la co-construction de solutions, elle contribue à la réparation des relations et à la résilience collective.
Dans des secteurs comme le social, le médico-social ou le médical marqués par des charges émotionnelles élevées et des interactions humaines complexes, avoir un outil qui favorise l’expression des émotions et des besoins de chacun se révèle précieux.
Lorsque les conflits apparaissent, la médiation intervient rapidement pour limiter leur impact sur les individus et les équipes. Elle offre un espace sécurisé pour aborder les sujets de désaccords, faire passer des messages restés sans réponse, exprimer les ressentis, et réfléchir ensemble à des solutions envisageables.
“En médiation on travaille la relation. Ce que l’on constate, en tant que médiateur, c’est que le conflit prend souvent racine dans un malentendu, un décalage entre l’intention d’un message et l’interprétation qu’on en fait. C’est pourquoi revenir sur ces événements, et que chacun puisse exprimer son ressenti et sa vision de la situation sans jugement c’est primordial si on veut dénouer le conflit.” précise Emilie Trampont, intervenante en médiation pour Epsilon Mélia
En entreprise, la médiation peut également être utilisée comme un outil de prévention. Elle aide à identifier les tensions naissantes et à instaurer un dialogue ouvert avant que les conflits ne s’enveniment. Elle agit comme un levier pour désamorcer les incompréhensions et favoriser une communication constructive.
“On pense souvent que parler de ce qui pose problème va renforcer le conflit et faire exploser les choses. En réalité c’est l’inverse, plus on évite d’en parler et on laisse les choses se faire, plus on vient renforcer et nourrir le conflit. C’est un peu l’image de la cocotte minute, si il n’y a pas de soupape pour laisser passer la vapeur ça explose. Dans un conflit, la médiation agit comme une soupape. Elle permet de relâcher la pression dans un cadre sécurisé en présence d’un tiers.”
Médiation et réduction des risques psychosociaux
Les risques psychosociaux (RPS), tels que le stress, le harcèlement, les conflits interpersonnels ou les tensions organisationnelles, constituent des défis majeurs pour les entreprises. Ces risques affectent directement la santé mentale et physique des salarié·es, tout en impactant la performance des équipes et de l’organisation. Les secteurs comme le social, le médico-social ou le médical n’y échappent pas également.
Conformément à l’article L4121-1 du Code du travail, les employeurs ont l’obligation de prévenir ces risques en garantissant un environnement de travail sain.l est bon de savoir que la médiation est reconnue comme étant une procédure à disposition des salariés ou de l’employeur pour prévenir et gérer ces risques psychosociaux même en cas d’allégation de harcèlement moral. Selon l’article L 1152-6 du code du travail, « une procédure de médiation peut être mise en œuvre par toute personne de l’entreprise s’estimant victime de harcèlement moral ou par la personne mise en cause ».
Un processus de médiation peut se mettre en place rapidement pour limiter les impacts des RPS sur les dirigeants et leurs équipes. La confidentialité du processus de médiation et de ses échanges offre un espace libre de parole pour exprimer les ressentis et clarifier les enjeux, permettant ainsi d’éviter une escalade des tensions. Parce que son contenu reste confidentiel, la médiation préserve également les participants de toute atteinte à leur notoriété.
“Ce serait mentir que de dire que la médiation peut tout résoudre et elle n’est pas là non plus pour se substituer à la loi. Mais en tant que médiateur indépendant, on constate souvent que l’on fait appel à nous très tardivement. Il m’est déjà arrivé de faire une médiation où les deux personnes ne s’étaient pas parlées depuis 2 ans. Ou parfois après une procédure disciplinaire ou une enquête interne. Même si la médiation est la bienvenue pour les personnes et a pu être bénéfique, à ce stade les relations sont déjà extrêmement dégradées.”
En proposant un cadre structuré et bienveillant, la médiation peut aider à améliorer durablement la qualité de vie au travail, à renforcer la cohésion des équipes et réduire les effets néfastes des RPS sur le bien-être et la productivité.
La médiation dans le travail social et médico-social
Les secteurs sociaux, médico-sociaux et médicaux sont particulièrement exposés aux tensions en raison de leur charge émotionnelle élevée et de l’intensité des interactions humaines. Ces environnements, marqués par des responsabilités importantes et une forte pression organisationnelle, sont des terrains fertiles pour l’apparition de conflits. Ces derniers peuvent survenir entre collègues, entre responsables et salarié·es, ou encore entre équipes et bénéficiaires des services.
Les risques psychosociaux spécifiques à ces secteurs
Les contraintes propres à ces métiers, comme la surcharge de travail, les conflits de valeurs, ou la nécessité de gérer des situations d’urgence, exacerbent les risques psychosociaux (RPS). Ces facteurs peuvent entraîner du stress, des tensions interpersonnelles ou encore du burnout, impactant non seulement la santé des professionnel·les, mais aussi la qualité des services rendus.
Le rôle central de la médiation
Dans ce contexte, la médiation joue un rôle important pour :
- Apaiser les tensions émotionnelles : En offrant un espace d’écoute et de dialogue, la médiation aide les parties à exprimer leurs frustrations et à trouver des solutions constructives et satisfaisantes pour chacun. Ce processus permet également d’éviter l’escalade des conflits en identifiant les déclencheurs émotionnels et en favorisant une approche empathique.
- Renforcer la cohésion d’équipe : En soulevant les malentendus, la médiation permet de rétablir la confiance et le respect mutuel, indispensables pour maintenir une coopération harmonieuse entre les membres d’une équipe. Elle peut être complétée par des formations à la communication non violente et au développement de l’intelligence émotionnelle, renforçant ainsi les compétences relationnelles de l’équipe.
- Réduire les impacts des RPS : En désamorçant rapidement les tensions, elle limite les conséquences sur la santé mentale des salarié·es et améliore la résilience collective. La médiation agit comme un outil préventif, favorisant une culture d’anticipation et de gestion des conflits dans l’organisation, et contribue à un meilleur climat de travail global.
Un outil pour des solutions durables
Un exemple concret pourrait être un conflit entre un travailleur social et un cadre autour de la répartition des tâches ou d’horaires non respectés. Grâce à la médiation, les parties peuvent exprimer leurs désaccords dans un espace sécurisé et explorer des solutions satisfaisantes pour chacun, tout en garantissant la continuité et la qualité des services. En intégrant la médiation dans leurs pratiques, les employeurs de ces secteurs favorisent un environnement de travail plus serein et protecteur, essentiel pour le bien-être des équipes et des bénéficiaires. L’intégration de la médiation dans les pratiques professionnelles peut inclure un suivi post-médiation pour faire le point sur les changements produits depuis la médiation, sur les solutions adoptées et ajuster les actions si nécessaire.
Quand recourir à la médiation ?
La médiation est particulièrement utilisée pour les conflits interpersonnels, entre deux ou trois personnes. Ce type de conflit est souvent alimenté par des incompréhensions, des attentes non exprimées ou à l’organisation du travail.
Voici quelques situations propices à une médiation :
- Désaccords entre collègues sur les priorités ou méthodes de travail ;
- Tensions entre un salarié et son manager dues à des styles de management perçus comme inadaptés ; ou à l’organisation du travail
- Les allégations de harcèlement ou de souffrance au travail nécessitant une intervention rapide pour protéger les parties concernées.
Lorsque le conflit implique un groupe plus large, comme une équipe entière ou plusieurs départements, il est aussi courant de recourir à des méthodes comme la régulation d’équipe. Celle-ci aborde les problématiques collectives et organisationnelles tout en maintenant une dynamique globale.
Comment se déroule une médiation ?
Le processus de médiation se structure généralement en plusieurs étapes :
- Préparation et analyse de la demande : Le médiateur prend tout d’abord connaissance du contexte par son commanditaire : quelles sont les parties prenantes au conflit, quels sont les dispositifs ou solutions qui ont déjà été tentés, quels sont les enjeux pour l’organisation.
- Information à la médiation et entretiens individuels : Le médiateur rencontre les parties séparément pour les informer sur le processus de médiation, clarifier leurs attentes, identifier les appuis et obstacles potentiels à la médiation, et recueillir leur consentement.
- Rencontre de médiation : Une fois les entretiens individuels terminés et avec l’accord des parties, une rencontre plénière de médiation est organisée. Cette rencontre se déroule en présentiel, de préférence dans un local neutre avec toutes les parties. Le cadre structuré et la présence du tiers médiateur agit pour que chacun puisse communiquer différemment du contexte de travail habituel.
Dans un premier temps, chaque partie est invitée à exprimer ce qui est important pour elle. Guidées par le médiateur, elles effectuent un travail sur leur relation ainsi que l’objet de leur conflit. Le médiateur utilise des techniques d’écoute active et de reformulation pour faciliter une compréhension mutuelle. Cette rencontre est l’occasion pour les parties d’éclaircir des malentendus ou incompréhensions et de chercher ensemble des solutions mutuellement satisfaisantes à leur différend.
Dans un deuxième temps, accompagnées du médiateur, elles co-construisent ensemble des pistes d’action qui répondent aux besoins exprimés. Si elles en un document synthétisant les engagements pris par chacun peut être formalisé et signé par les parties si elles le souhaitent. A la fin de cette rencontre de médiation, les parties décident si elles ont besoin de se revoir à nouveau en médiation, ou si elles mettent fin au processus.
Un suivi post-médiation est proposé aux parties pour faire le point sur les engagements pris lors de la médiation, et sur les changements produits.
Un suivi peut être organisé à intervalles réguliers pour garantir la durabilité des accords.
Enfin, le rôle du médiateur va au-delà de la simple facilitation. Il agit comme un guide, veillant à la qualité des échanges et à la prise en compte des émotions de chacun. Sa posture empathique est essentielle pour transformer les conflits en opportunités d’évolution.
Favoriser des relations apaisées grâce à la formation et aux interventions externes
Dans un environnement professionnel, apaiser les tensions est indispensable pour préserver une dynamique collective harmonieuse. La médiation, en tant que processus structuré et bienveillant, offre une approche humaniste qui agit comme levier pour renforcer le relationnel et la prise de responsabilité des équipes. L’utiliser comme outil c’est aussi construire une culture du dialogue et de la coopération pour son organisation.
Pour les employeurs, intégrer la médiation dans leurs pratiques est un atout à ne pas négliger pour travailler à l’amélioration de la qualité de vie et des conditions de travail. Que ce soit en formant leurs cadres à la médiation et gestion des tensions ou en recourant à des médiateurs externes lorsque les situations l’exigent. En investissant dans ces démarches, les organisations favorisent un climat de travail protecteur et respectueux, où les relations professionnelles redeviennent un moteur de performance collective et de bien-être au quotidien.