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La Communication Alternative et Améliorée (CAA) : le guide complet pour comprendre et agir

La parole n’est pas le seul moyen d’échanger. Quand des personnes ont des difficultés pour communiquer, il existe des techniques et outils permettant de s’exprimer et de comprendre les autres. Il s’agit de la communication alternative et améliorée (CAA).

Dans cet article

Définition et principes fondamentaux de la Communication Alternative et Améliorée

Qu’est-ce que la CAA ?

La Communication Alternative et Améliorée désigne un ensemble coordonné de moyens – avec ou sans outils – qui rendent possibles des échanges compréhensibles et intentionnels lorsque la parole manque… ou ne suffit pas.

Définition de la CAA par l'ISAAC

L’International Society for Augmentative and Alternative Communication (ISAAC) nous donne une définition de référence de la CAA :

« La CAA comprend tous les moyens de communication (autres que la parole orale) utilisés pour exprimer des pensées, des besoins, des désirs et des idées. Elle inclut des gestes, le langage des signes, des symboles, des tableaux de communication et des technologies de communication assistée. »

L’objectif de la CAA est de permettre à chaque personne de dire ce qu’elle veut, quand elle veut, à qui elle veut et comme elle veut – sans jamais forcer la communication.

Que signifient « Alternative » et « Améliorée » (ou « augmentée ») ?

Dans CAA, les deux “A” désignent deux concepts complémentaires :

  • Alternative : quand la parole est absente, on remplace l’oral par d’autres moyens (signes, pictogrammes, objets de référence, claviers, dispositifs à synthèse vocale, etc.).
  • Améliorée / Augmentée : quand la parole existe mais reste difficile à comprendre, on la soutient pour la rendre plus claire (stratégies visuelles, orthographiques, vocaliques, technologies d’aide).

Un principe clé de la CAA est la multimodalité. Un utilisateur efficace ne se limite jamais à un seul outil. Il combine une riche palette de moyens — gestes, images, écrits, sons, technologies et partenaires humains — pour adapter sa communication au contexte, à son interlocuteur et à son message.

Fonction Quand l’utiliser ? Exemples d'outils
Alternative Parole absente ou inutilisable Pictogrammes, PECS, classeurs PODD, dispositifs à synthèse vocale
Améliorée (ou Augmentée) Parole présente mais peu intelligible Mots-clés écrits, structures visuelles, prédiction de mots, générateurs de parole

Les objectifs éthiques et pratiques de la CAA

La CAA est avant tout un levier puissant d’inclusion et de participation sociale. Elle vise à permettre aux personnes ayant des troubles de la communication de s’intégrer pleinement dans tous les domaines de la vie, de l’école à l’emploi, en passant par les relations sociales et familiales.

Cet objectif s’ancre dans l’idée que communiquer est un droit humain fondamental, un prérequis essentiel à la dignité. La Convention relative aux droits des personnes handicapées de l’ONU constitue le cadre de référence international qui reconnaît la CAA comme un élément indispensable à l’exercice de ce droit.

Au-delà de l’échange d’informations, la CAA est un vecteur essentiel d’autodétermination. Elle donne à la personne les moyens de faire des choix, d’exprimer ses préférences, ses désirs, mais aussi ses refus.

"On parle beaucoup d’autodétermination, mais on oublie souvent que pouvoir dire non, ou exprimer ce qu’on aime, ce sont des actes au cœur de l’autodétermination."

Silvia Bolelli

Psychologue clinicienne et formatrice

Cette autonomie de communication se définit de manière simple et puissante : on doit pouvoir dire ce que l’on veut, quand on veut, à qui on veut, de la manière que l’on veut.

Cette approche repose sur un principe fondateur : la présomption de compétence (ou présomption de potentiel). Ce postulat éthique affirme que toute personne est capable de communiquer et d’apprendre si on lui en donne les moyens adaptés. Plutôt que de se focaliser sur les limites, on se concentre sur les leviers d’apprentissage pour libérer le potentiel de chacun. Identifier pour qui ces solutions sont essentielles est donc une étape cruciale.

Pour qui et dans quels contextes ?

Le champ d’application de la Communication Alternative et Améliorée est extrêmement large. Il concerne des personnes de tous âges, avec des besoins permanents ou temporaires, et ce dans de multiples contextes de vie.

La CAA s’adresse à toute personne dont le handicap ou la situation entraîne des troubles de la parole ou du langage. On peut distinguer plusieurs grandes catégories de besoins :

Troubles congénitaux ou développementaux

Ces conditions sont présentes dès la naissance ou apparaissent durant le développement :

  • Paralysie cérébrale
  • Déficience intellectuelle
  • Troubles du spectre de l’autisme (TSA)
  • Syndromes génétiques (ex: syndrome de Rett)
  • Trisomie 21
  • Polyhandicap
  • Dysphasie (trouble spécifique du langage oral)

Troubles acquis

Ces difficultés apparaissent au cours de la vie, souvent suite à un accident ou une maladie :

  • Accident Vasculaire Cérébral (AVC) et aphasie consécutive
  • Traumatisme crânien
  • Maladies neurodégénératives (ex: Sclérose Latérale Amyotrophique – SLA, maladie de Parkinson, etc.)

Usage temporaire ou situationnel

La CAA peut être une solution transitoire ou contextuelle :

  • Pour soutenir le développement du langage chez un jeune enfant.
  • Pour recouvrer la parole après une intubation, un accident ou une intervention chirurgicale.
  • Pour des personnes ne parlant pas la langue locale, comme un enfant primo-arrivant en classe, afin de faciliter sa compréhension et son inclusion.

Le cadre légal et institutionnel en France

En France, ce vaste champ est désormais encadré par un contexte légal et institutionnel précis, qui renforce l’importance stratégique de son déploiement, notamment dans les structures sociales et médico-sociales.

Depuis le 23 juin 2025, la CAA est devenue un droit fondamental et opposable pour toute personne accueillie dans les Établissements et Services Sociaux et Médico-Sociaux (ESSMS), tels que les IME, MAS, FAM ou EHPAD.

L’Instruction DGCS/SD3B/2025/86 impose alors des obligations claires et non négociables pour ces structures :

• Identifier systématiquement les besoins en communication de chaque personne accueillie.
• Mettre en place les outils de CAA adaptés à ces besoins.
• Former les professionnels à leur utilisation pour garantir une mise en œuvre efficace.
• Intégrer la démarche CAA dans tous les documents institutionnels (projet d’établissement, contrat de séjour, livret d’accueil, etc.).

Cette obligation s’inscrit dans la droite lignée de la Convention ONU relative aux droits des personnes handicapées et engage directement la responsabilité des autorités de contrôle (ARS, Conseils départementaux). Pour les directeurs d’ESSMS, ignorer cette nouvelle obligation n’est plus une option et présente des risques significatifs.

Quels sont les risques encourus par les ESSMS et leurs dirigeants ?

Type de risque Description
Administratif Injonctions de l’ARS, perte de financements, sanctions dans le cadre des CPOM (Contrat Pluriannuel d'Objectifs et de Moyens).
Civil Recours de familles pour atteinte aux droits fondamentaux de la personne accompagnée.
Pénal Mise en danger d’autrui, maltraitance institutionnelle, atteinte à la dignité.
Managérial Révocation ou licenciement pour faute de gestion.

Face à ces enjeux, il est impératif de connaître le catalogue des solutions existantes pour pouvoir les déployer efficacement.

Le catalogue des solutions de CAA

La richesse de la Communication Alternative et Améliorée réside dans la grande diversité de ses outils. Il n’existe pas de solution unique ou universelle.

Le succès repose sur la création d’un système de communication personnalisé, qui combine souvent plusieurs options (multimodalité) pour s’adapter parfaitement aux capacités de la personne et aux différentes situations de la vie quotidienne.

CAA sans assistance technique (No-tech)

Ces méthodes de communication n’utilisent aucun équipement externe, mais mobilisent uniquement le corps de la personne. Elles sont le fondement de toute communication et doivent toujours être observées et valorisées.

Communication corporelle spontanée

C’est la base de l’échange.
Elle inclut les gestes naturels, les mouvements du corps, les expressions faciales, l’orientation du regard et les vocalisations (sons, rires, etc.).

Codes gestuels formalisés

Ces systèmes structurés permettent de transmettre des messages plus complexes et partagés.

  • Le Makaton : un programme qui combine signes, pictogrammes et parole.
  • Le Coghamo : un langage gestuel simplifié, adapté aux personnes ayant des difficultés motrices.
  • La Langue des Signes Française (LSF) : une langue à part entière, avec sa propre grammaire et syntaxe.

Le code Oui/Non

L’établissement d’un code « oui/non » fiable et personnalisé est absolument crucial.
Il constitue la première étape vers l’autodétermination, en permettant à la personne d’accepter ou de refuser. Ce code peut se manifester par un mouvement de tête, un regard, un son ou tout autre signe reproductible par la personne.

CAA avec Assistance Technique (Aided Systems)

Cette catégorie regroupe tous les outils externes à la personne, allant du plus simple support papier aux dispositifs électroniques les plus sophistiqués.

Basse technologie (Low-tech) et Moyenne technologie (Mid-tech)

Souvent non-électroniques ou dotés d’une technologie simple, ces outils sont fondamentaux. Ils constituent un excellent point de départ, un complément indispensable à la haute technologie ou un système de secours fiable en cas de panne.

"Je dis souvent à mes stagiaires : on peut faire de la CAA avec du papier plastifié et une imprimante couleur !"

Silvia Bolelli

Psychologue clinicienne et formatrice

Supports visuels statiques

  • Tableaux de communication (ou Tableaux de Langage Assisté – TLA) : grilles de symboles (photos, pictogrammes) spécifiques à une activité.
  • Pictogrammes : dessins symboliques utilisés pour représenter des mots ou des idées. Les banques d’images les plus connues sont PCS (Picture Communication Symbols) et Arasaac (gratuit).
  • Classeurs et cahiers de communication : supports organisés qui rassemblent un vocabulaire plus large.

Méthodes structurées

  • PECS (Picture Exchange Communication System) : un système basé sur l’échange d’images pour initier la demande et la communication fonctionnelle.
  • PODD (Pragmatic Organisation Dynamic Display) : des classeurs de communication robustes dont le vocabulaire est organisé de manière pragmatique pour faciliter la construction de phrases.

Moyenne technologie

  • Boutons enregistreurs et contacteurs : dispositifs simples permettant d’enregistrer et de diffuser un message vocal court (ex : « encore », « j’ai fini »).

Haute technologie (High-tech)

Cette catégorie fait appel à des dispositifs électroniques avancés, généralement équipés d’une sortie vocale (aussi appelés SGD – Speech-Generating Devices ou VOCA – Voice Output Communication Aids). Ces outils offrent des possibilités de communication étendues, mais leur dépendance à la technologie impose de toujours prévoir un système de secours basse technologie (low-tech) robuste en cas de panne, de batterie déchargée ou de contexte inadapté (piscine, extérieur).

Logiciels spécialisés

Des applications puissantes installées sur tablettes ou ordinateurs dédiés. Parmi les plus connus, on trouve MindExpress, Grid3, Snap Core First, et Proloquo2go.

Modes d’accès alternatifs

Pour les personnes ayant des limitations motrices importantes, l’accès à l’outil est primordial.

  • Commande oculaire (eye-tracking) : le dispositif suit le regard de l’utilisateur pour qu’il puisse sélectionner des symboles sur l’écran.
  • Suivi de la tête (head-tracking) : un capteur suit les mouvements de la tête pour déplacer un curseur.
  • Balayage par contacteur : les options sont balayées une à une et la personne valide son choix en activant un contacteur (avec la main, le pied, la tête, etc.).

Stratégies d’amélioration du taux de réponse

Pour compenser la lenteur de la communication, des techniques comme l’encodage (utiliser une courte séquence pour générer un long message) et la prédiction de mots sont intégrées pour accélérer la génération des messages.

Posséder ces outils est une première étape, mais leur succès dépend entièrement de la stratégie de mise en œuvre et de l’accompagnement humain qui l’entoure.

Récapitulatif du catalogue des solutions de CAA

Type de CAA Description Exemples concrets ✅ Avantages ⭕ Limites - Points de Vigilance Quand l’utiliser ?
Sans assistance (No-tech) Utilise uniquement le corps, les gestes, le regard ou les expressions faciales. Aucun support matériel. Langue des signes française (LSF), Makaton, code Oui/Non, expressions du visage, pointage du regard. Accessible immédiatement, gratuit, utilisable partout, favorise la spontanéité. Vocabulaire limité, dépend de la compréhension des partenaires, difficile pour les messages complexes. En toute situation, en première approche, ou comme base d’un système multimodal.
Avec assistance “basse technologie” (Low-tech) Utilise des supports physiques simples, souvent imprimés ou plastifiés. Tableaux de communication, pictogrammes Arasaac/PCS, classeurs PODD, système PECS, cartes d’échange. Peu coûteux, robustes, personnalisables, ne tombent pas en panne, utiles en complément du high-tech. Nécessite un apprentissage, mise à jour manuelle, encombrant si vocabulaire étendu. Dans les établissements, à domicile, ou comme support de secours du high-tech.
Avec assistance “haute technologie” (High-tech) Utilise un dispositif électronique avec synthèse vocale ou interface numérique. Applications comme Proloquo2Go, Grid3, Snap Core First, MindExpress, commande oculaire, contacteur. Communication fluide, voix synthétisée, grande richesse lexicale, adaptable à la motricité. Coût élevé, dépendance à la technologie (batterie, pannes), nécessite accompagnement et maintenance. Pour un usage quotidien, professionnel ou scolaire, quand la motricité et la cognition le permettent.

Stratégies de mise en oeuvre et d’accompagnement

Le succès de la Communication Alternative et Améliorée repose moins sur la sophistication de la technologie que sur une approche humaine, collaborative et stratégique. La mise en place d’un système de CAA est un projet dynamique, centré sur la personne et son environnement, qui nécessite méthode, implication et formation.

L’évaluation et la sélection de l’outil

Avant toute chose, une observation méthodique des modes de communication spontanés de la personne est indispensable : Comment exprime-t-elle ses goûts, ses intérêts, ses refus ? Quels sont ses gestes, ses regards, ses vocalisations ?
Cette observation, croisée entre la famille et les professionnels, est le point de départ de toute démarche pertinente.

L’évaluation doit ensuite être complétée par un bilan global des capacités de la personne :

  • Motrices : pour déterminer le mode d’accès le plus adapté (pointer du doigt, commande oculaire, contacteur).
  • Visuelles et auditives : pour choisir la taille, le contraste et le type de symboles, ou intégrer des retours sonores.
  • Cognitives et langagières : pour organiser le vocabulaire de manière logique et progressive.

Des outils d’évaluation spécifiques, comme le CHESSEP (Communication Handicap complexe : Évaluer, Situer, S’adapter, Élaborer un Projet individualisé) ou le COMVOOR-2, permettent d’objectiver les observations et de guider le choix de la solution la plus appropriée. L’approche doit toujours être individualisée : l’outil est choisi avec et pour la personne, en respectant ses préférences et ses aptitudes.

Le rôle crucial des partenaires de communication et de la formation

La CAA n’est pas l’affaire d’un seul spécialiste. Sa réussite dépend de l’implication de tout l’entourage, formant un véritable « cercle de communication » actif. Cela inclut :

  • Une équipe pluridisciplinaire coordonnée, impliquant notamment orthophoniste et ergothérapeute.
  • La famille et les aidants, qui sont les partenaires de communication du quotidien.

Il est fondamental de proposer une formation pragmatique et désinhibante à tous les partenaires. L’objectif n’est pas de les transformer en experts, mais de leur donner la confiance et les stratégies de base pour modéliser l’utilisation de l’outil et créer des opportunités de communication tout au long de la journée.

Cela permet de développer une véritable culture CAA au sein des familles et des institutions (comme un IME), où la communication est perçue comme une priorité partagée et une co-construction permanente.

Bonnes pratiques de formation et d’accompagnement

Objectif : Créer un environnement où la communication assistée devient naturelle, partagée et valorisée par tous.

À faire :

  • Impliquer dès le départ la famille et les aidants dans le choix et l’usage des outils.
  • Valoriser les réussites : filmer, photographier ou noter les situations de communication réussies pour les partager avec l’équipe.
  • Utiliser l’outil CAA dans les activités de tous les jours (repas, habillage, jeux, sorties), pas uniquement en séance.
  • Modéliser en permanence : les partenaires doivent utiliser eux-mêmes la CAA pour montrer l’exemple.
  • Prévoir un temps de coordination interdisciplinaire (orthophoniste, ergothérapeute, éducateur, psychologue, famille).

À éviter :

  • Confiner l’usage de la CAA à un seul professionnel ou à un seul moment de la journée.
  • Changer d’outil trop vite sans évaluation concertée.
  • Oublier de prévoir un système de secours low-tech pour les pannes, déplacements ou contextes sans électricité.

En cultivant ces réflexes collectifs, la CAA devient une culture partagée, et non une compétence isolée.

La CAA en milieu scolaire et institutionnel

Pour être véritablement inclusive, la CAA ne doit pas se limiter à un usage individuel en tête-à-tête. L’approche « Whole School » (ou « tout l’établissement ») vise à intégrer la CAA de manière systémique dans l’environnement. Cette stratégie implique que tout le personnel (enseignants, AESH, personnel de cantine, agents d’entretien) soit sensibilisé et formé aux bases de la CAA.

Voici quelques exemples concrets de cette approche :

  • Signalétique en pictogrammes dans tout l’établissement (toilettes, cantine, bibliothèque).
  • Installation de tableaux de communication géants dans les classes, la cour de récréation ou les lieux de vie communs.
  • Utilisation de quelques signes clés du Makaton par tous les adultes et enfants lors des rituels quotidiens.

En rendant la CAA visible et accessible à tous, cette approche généralisée permet de réduire la stigmatisation. L’élève utilisateur n’est plus le seul à utiliser des outils différents ; la communication visuelle devient une norme pour tous.

Cette approche systémique est la manifestation la plus concrète de la présomption de compétence : en faisant de la CAA une norme environnementale, l’établissement postule que chaque élève a le potentiel de communiquer et qu’il est de la responsabilité de tous de lui en donner les moyens.

Les bénéfices avérés de la CAA

Les bénéfices de la Communication Alternative et Améliorée s’étendent bien au-delà de la simple capacité à transmettre un message. La CAA est un puissant outil de développement personnel, un facteur de bien-être psychologique et un gage de sécurité pour les personnes les plus vulnérables.

Soutien au développement du langage oral

Une idée reçue tenace prétend que la CAA freinerait l’apparition de la parole. C’est un mythe.

De nombreuses études démontrent au contraire que la CAA peut encourager et soutenir le développement du langage oral. En offrant un moyen de communication fiable, elle réduit la pression et l’anxiété liées à l’obligation de parler, ce qui permet à la personne de se concentrer sur l’interaction et peut libérer la production orale.

Réduction des comportements-défis

De nombreux comportements jugés « problématiques » (agitation, cris, colère, agressivité) sont en réalité des tentatives de communication de la part d’une personne qui ne dispose pas d’autre moyen pour s’exprimer.

En offrant un canal pour formuler une douleur ou un problème de santé, une frustration, un besoin ou un désir, la CAA contribue de manière significative à l’apaisement et à la réduction durable de ces comportements. L’anecdote rapportée par Silvia Bolelli, concernant un résident en foyer d’accueil, est parlante : la simple découverte que ce dernier préférait le café au thé, grâce à un tableau de communication, a transformé son quotidien et apporté de la joie à l’équipe.

Lutte contre les violences et la maltraitance

La CAA est un outil de sécurité et de protection vital. Elle donne aux personnes vulnérables, qui sont plus exposées aux risques de maltraitance, les moyens de signaler un problème, de dire « non », de se défendre ou de témoigner.

Pouvoir dire « j’ai mal », « arrête » ou « je n’aime pas ça » est une compétence fondamentale pour se protéger. C’est pourquoi la CAA est explicitement intégrée dans la Stratégie nationale de lutte contre les maltraitances (2024–2027) comme un levier de prévention essentiel.

Amélioration de la qualité de vie

En résumé, la CAA transforme la vie. Elle renforce l’autonomie en permettant de faire des choix quotidiens. Elle améliore la qualité des relations sociales avec la famille et les pairs. Elle contribue à une meilleure santé mentale en réduisant la frustration et le sentiment d’isolement. En définitive, elle est un pilier de l’inclusion et de la dignité.

Les bénéfices pour les professionnels et les aidants

Les bénéfices de la CAA s’étendent en réalité à tout l’écosystème humain qui l’entoure : professionnels, aidants et familles. Elle agit comme une véritable révolution éthique et relationnelle, redonnant sens, cohérence et humanité au quotidien des équipes.

En permettant à chacun d’exprimer ses besoins, ses émotions et ses choix, la CAA apaise les tensions et transforme la relation d’accompagnement. Les équipes découvrent souvent des aspects méconnus de la personnalité de la personne — un goût, une préférence, une émotion — qui réenchantent le lien et réaffirment la valeur du métier.

Pour les structures, elle offre une meilleure sécurité juridique et valorise l’engagement éthique des équipes.

Témoignage de Silvia Bolelli

"Ce jour-là, tout est parti d’un simple tableau de communication.
Après le repas, plusieurs boissons étaient proposées. Par habitude, les collègues servaient toujours du thé à ce résident — c’était devenu un réflexe.

Et puis, grâce au tableau, il a pointé… le café.

Ce geste, si simple en apparence, n’était pas seulement une préférence exprimée — c’était une rencontre.
Pour la première fois, les professionnels ont eu le sentiment de découvrir la personne au-delà des routines et des suppositions.

Un moment qui a rappelé à toute l’équipe pourquoi elle fait ce métier : pour donner à chacun la possibilité d’exister à sa manière, jusque dans les détails les plus quotidiens.
Ce jour-là, autour d’une tasse de café, c’est tout un sens retrouvé de l’accompagnement qui s’est partagé."

Silvia Bolelli

Psychologue clinicienne et formatrice

Le succès de la CAA

Film proposé par ISAAC Pays-Bas

En résumé

La Communication Alternative et Améliorée est bien plus qu’une série de techniques ou une simple obligation légale.

Elle représente une avancée humaine et éthique majeure, une reconnaissance du droit inaliénable de chaque individu à être entendu, compris et respecté. L’échéance de juin 2025 doit donc être perçue moins comme une contrainte réglementaire que comme une opportunité historique de transformer nos pratiques et d’aligner enfin la loi sur la dignité humaine.

En changeant notre regard sur la communication, nous offrons aux personnes en situation de handicap les clés de leur propre épanouissement.

À retenir :

  • La CAA est un droit fondamental : depuis juin 2025, la CAA est devenue une obligation légale dans les ESSMS en France, qui vise à garantir la dignité et l’autodétermination.
  • La multimodalité est la clé : la CAA la plus efficace combine différents outils (sans, avec basse et haute technologie) adaptés à la personne et au contexte.
  • C’est un travail d’équipe : le succès repose sur l’implication et la formation de tout l’entourage (famille, professionnels) pour créer une culture de communication inclusive.
  • Les bénéfices sont globaux : la CAA réduit les troubles du comportement, prévient la maltraitance, soutient le langage oral et améliore radicalement la qualité de vie.

Ressources et références

Beukelman, D. R., & Mirenda, P. (2005). Augmentative & alternative communication: Supporting children & adults with complex communication needs.
Instruction DGCS/SD3B/2025/86 du 23 juin 2025
ISAAC Francophone : Association de référence pour la défense des droits, l’information et les formations